RCI ya – plus – drap ?

Ça paraissait bizarre alors que depuis plusieurs années, c’est un silence assourdissant sur la Côte d’Ivoire, sur les rapatriés français que l’on ignore comme une maladie honteuse, sur la désinformation constante à laquelle se livrent les différentes parties en présence (une caractéristique majeure de la françafrique) on voit ces dernières semaines, plusieurs documents sur le sujet de la Côte d’Ivoire (Pièces à conviction sur France 3, La bataille d’Abidjan sur Arte…) diffusés à des heures de grandes écoutes sur des chaînes nationales… Des émissions qui montrent beaucoup de choses, mais qui finalement ne révèlent pas grand-chose sur les dessous des cartes.

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Alors que la « crise Ivoirienne » s’enlise depuis maintenant plus de 4 ans, on voit à quelques jours des élections présidentielles en France apparaître un dénouement pour le moins surprenant : un accord entre les deux parties en présence, portant sur les élections (élections maintes fois repoussées par Laurent Gbagbo) et une entente jusqu’à des élections dans une dizaine de mois !

Outre la présence française et le rôle de la Côte d’Ivoire dans le pré carré africain de la France, il serait important que les Français aient été et soient encore aujourd’hui mieux informés de ce qu’il s’y passe, des enjeux et des implications de la France et des voisins de la Côte d’Ivoire dans cette crise et de la position délicate dans laquelle la France s’est mise là-bas…

Chirac et le gouvernement de Dominique de Villepin, qui s’apprêtent à quitter la place et qui auront sans doute des choses à redouter du nouveau locataire de l’Élysée, essayent-ils de se débarrasser vite fait mal fait d’un cadavre françafricain qui reste dans leur placard ?

Comme on peut le lire dans l’excellent dossier « Côte d’Ivoire en guerre : dynamiques du dedans et du dehors » de Politique Africaine (N° 89 mars 2003), chapitre La politique de l’engagement de la France

« Au Figaro, Toussaint Alain* a déclaré le 8 février 2002 : « Villepin devrait se méfier. Les dessous des relations franco-ivoiriennes, notamment à l’époque où il était secrétaire général de l’Élysée, ne sont pas toujours très reluisants. Nous sommes un peu étonnés qu’après toutes les largesses dont la Côte d’Ivoire à fait preuve à l’égard de l’Élysée, Monsieur de Villepin se comporte ainsi. Nous aussi, nous avons des dossiers. »

* Conseiller en communication à Paris de Laurent Gbagbo.

Comme le précise l’association Survie, que l’on ne peut pas qualifier de pro interventionniste quand il s’agit d’envoyer des troupes françaises en Afrique, l’absence d’intervention de la France dans ce cas précis aurait peut-être mené à des événements du même type que ce que l’on a vu au Rwanda.

Toujours dans Politique Africaine (N°97 mars 2005) « Côte d’Ivoire : le canari d’eau de Jacques Chirac » par Yacouba Konaté :

« Pour transformer une situation apparemment ouverte en un problème insoluble, les acteurs politiques ont disqualifié les instances d’arbitrage, épuisé les médiateurs, renié leurs engagements et renégocié les accords passés. Tout en proclamant l’unité et leur attachement à la Côte d’Ivoire, ils n’ont accepté que des compromis ambigus. Ils ont créé des milices, ruiné l’économie et érodé l’autorité de l’État, en attendant les sanctions onusiennes. Au final, la situation sociopolitique est gelée. Actionnés par les mouvements patriotiques, les blocages économiques et sociaux trouvent leurs relèves militaires dans les milices d’autochtones. »

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On peut effectivement, a priori se réjouir des propos de Laurent Gbagbo, qui mettent en avant une « solution africaine » sans interventions autres qu’africaines, et qui va jusqu’à parler d’amitié avec le Burkina Fasso, de communauté de destin.

Mais on peut aussi craindre, si aujourd’hui la force d’interposition Française se retire aussi rapidement, et compte tenu du fait que chacune des deux parties en présence n’avait jusqu’à présent souhaité qu’une seule chose, c’était d’avoir les coudées franches pour en finir avec l’adversaire, chacune persuadée qu’elle l’emporterait rapidement sur l’autre, c’est que ces manoeuvres ne visent qu’à se débarrasser d’un empêcheur de régler les comptes en rond pris dans une position de ni Gbagbo, ni rebelles (sans n’avoir jamais été cohérent pour soutenir l’un ou l’autre, ou n’avoir jamais réussi à imposer une nouvelle équipe par un coup).

À moins que l’entente vise à se débarrasser tout simplement d’un allié volage dont les coups on fait long feu, le risque de se désengager trop vite n’est-il pas le risque de se diriger vers un bain de sang si les deux parties veulent finir le travail

images extraites du document « Pièces à conviction – Côte d’Ivoire : roquettes sur nos soldats » diffusé sur France 3 le 2 mars 2007.